Self-défense : Notre entretien avec une instructrice installée à Paris
30 avril 2024 à 11h11 par Estelle Lafont
Rien qu’en cherchant les termes « self-défense » et « Paris », une vingtaine de choix s’offrent à vous. Depuis 10 ans la demande a grimpé mais pas forcément pour une pratique linéaire d’après Liudmyla Synenko, professeur de self-défense chez ABHAYA à Paris (16e).
Depuis 6 ans, Liudmyla Synenko enseigne dans le 16e arrondissement à ABHAYA, l’école des pratiques de force. Championne d’Ukraine en karaté kyokushin (une forme de karaté qui met l’accent sur le combat réel) et en kumite (la forme de combat conventionnel du karaté, qui se pratique avec un partenaire et non seul), plus de 10 ans d’enseignement et ayant servi dans la police, son CV est impressionnant.
Ce qui est impressionnant aussi, ce sont les chiffres publiés en janvier dernier par le service statistique du ministère de l’Intérieur (SSMSI), les crimes et délits ont augmenté, avec par exemple 8% de violences sexuelles supplémentaires, 13% pour les tentatives d’homicides et +2% pour les vols avec armes notamment dans les transports en communs.
Le public semble s’être beaucoup intéressé à la pratique du self-défense depuis de nombreuses années déjà, mais son nombre d’adhérents aujourd’hui est-il vraiment en hausse ? Pas certain….
« Je pense qu’il y a une certaine peur oui mais qui germe chez les gens à cause d’incidents rendus public, avec les images que l’on peut voir dans les médias, surtout quand il y a des conséquences dramatiques, le public pousse les portes des cours de self-défense mais pendant une certaine période, l’intérêt s’étiole après quelques semaines, et ce ne sont pas des gens qui restent inscrits toute l’année » nous raconte Lyudmila Synenko.
En revanche, le spectre des participants est lui plus large, « chez nous c’est à partir de 18 ans et ensuite on a vraiment de tout, des internationaux qui habitent en France, des groupes « spécial femmes » et même un module pour les + de 60 ans qui au passage d’ailleurs sont le public le plus assidu et le plus rigoureux sur l’exercice physique » poursuit-elle.
C’est l’intérêt des femmes qui est le plus fluctuant, « elles ont tendance s’y intéresser d’un coup parce qu’il y a eu un évènement et pendant cette période, (elles) vont beaucoup venir », pour se rassurer probablement et se donner quelques bases « au cas où ».
Connaître les gestes < État psychologique
D’abord il faut dissocier les arts martiaux du self-défense car, « la technique c’est visuel, mais ça ne représente pas la réalité de ce qui arrive dans une agression » précise-t-elle. « Ce qui compte en self-défense c’est le mental, l’état psychologique qu’on développe à l’instant où on devient une victime (…) on peut connaitre 1000 mouvements, 1000 techniques mais être paralysé par la peur sur le moment, et là vous ne pourrez pas utiliser vos connaissances » poursuit-elle.
C’est pour ça que dans ces cours, Liudmyla ajoute un entrainement psychologique, « une préparation, une situation pénible pour le corps, pour les sensations, pour mieux « se préparer » ».Elle ajoute de manière évidente qu’une agression a souvent lieu « par derrière » et qu’il faut « éviter de donner son dos, c’est mieux de faire face » si jamais on a senti le danger ajoute-t-elle.
La vigilance, « c’est la meilleure défense, car je remarque en cours chez nous il y a malheureusement des pratiquants à qui c’est arrivé et le plus souvent, ils n’ont rien vu venir ou pas senti l’agresseur arriver » nous apprend-elle. Parmi les conseils à retenir, il y a évidemment : éviter les endroits peu éclairés et peu fréquentés à certaines horaires (même si on a appris aussi que chez beaucoup de femmes, les agressions ne surviennent pas forcément le soir) mais aussi faire attention à ce qui dévie votre attention et votre ouïe (visionner une vidéo en marchant ou écouter quelque chose trop fort dans son casque).
Et enfin, si jamais une agression survient, « le premier réflexe c’est d’essayer de se sauver, et si ce n’est pas possible il ne faut pas chercher à blesser pour devenir l’agresseur mais chercher à attaquer l’endroit le plus faible pour sauver sa vie, faire lâcher l’attaquant (…) et donc là on a plusieurs solutions, les yeux, les organes génitaux et le genou aussi qui est faible si on frappe en biais » conclut-elle.
Sachez que si vous souhaitez vous inscrire à ce genre de cours, l’adhésion annuelle varie entre 300 et 400 euros, mais certaines écoles proposent une pratique sous forme de stages ou en condensé pour les budgets plus serrés.