Olivier Duhamel accusé d’inceste : prescrite, l’affaire est classée sans suite
14 juin 2021 à 9h45 par Iris Mazzacurati
L'enquête visant le politologue de renom Olivier Duhamel, qui a reconnu avoir agressé sexuellement son beau-fils "Victor" Kouchner lorsque ce dernier était mineur dans les années 1980, a été classée sans suite au seul motif que les faits sont prescrits, a annoncé lundi le procureur de Paris Rémy Heitz.
Cinq mois après l'ouverture d'une enquête pour "viols et agressions sexuelles par personne ayant autorité sur mineur de 15 ans", "le parquet de Paris a procédé ce jour au classement sans suite de la procédure, en raison de la prescription de l’action publique", écrit le procureur dans un communiqué.
"Ce motif de classement est retenu lorsque les faits révélés ou dénoncés dans la procédure constituent une infraction qui aurait donné lieu à poursuites de la part du parquet si le délai fixé par la loi n’était pas dépassé", explique le magistrat.
M. Duhamel, 71 ans, avait été entendu comme suspect libre le 13 avril par la Brigade de protection des mineurs (BPM). Le politologue, ancien eurodéputé et figure médiatique, avait reconnu "difficilement" les faits d'inceste, selon une source proche du dossier.
Les accusations à l'origine de l'affaire, contenues dans le livre La Familia Grande, ont fait grand bruit depuis début janvier : dans ce récit autobiographique, Camille Kouchner accuse son beau-père d'avoir agressé son jumeau, surnommé "Victor", à la fin des années 1980.
Fils de l'ancien ministre Bernard Kouchner et de la professeure de droit Evelyne Pisier (morte en 2017) qui s'était remariée avec Olivier Duhamel, "Victor" avait été interrogé dans une première procédure ouverte en 2011. Il avait alors refusé de déposer plainte pour ces faits, déjà probablement prescrits.
Le délai de prescription étendu de 20 à 30 ans
Aujourd'hui âgé d'environ 45 ans, "Victor" avait été entendu par les nouveaux enquêteurs le 21 janvier et s'était finalement résolu à déposer plainte.
En 2018, le parlement a étendu le délai de prescription de 20 à 30 ans après la majorité de la victime en matière de crimes sexuels sur des mineurs, mais ce nouveau rallongement du délai ne s'applique pas aux faits qui étaient déjà prescrits lorsque la loi a été promulguée.
La publication du livre de Camille Kouchner a suscité une libération de la parole avec de nombreux témoignages sur l'inceste, notamment sur les réseaux sociaux, et un vaste débat sur la lutte contre ces violences.
Le 26 février, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti avait écrit aux procureurs pour exiger une enquête systématique sur les révélations d'infractions sexuelles sur mineurs, même quand les faits étaient susceptibles d'être prescrits. Non seulement pour vérifier si la prescription était acquise, mais également pour identifier d'éventuelles autres victimes ainsi que pour permettre aux personnes accusées de s'expliquer.
(Avec AFP)