La santé mentale, un tabou qui persiste chez les hommes
17 novembre 2023 à 7h00 par Étienne Escuer
A l’occasion de Movember, focus sur le tabou qui persiste autour de la santé mentale des hommes.
Sensibiliser à la santé masculine : c’est le but de Movember, une initiative qui se tient chaque mois de novembre. L’occasion de parler des cancers masculins, comme ceux de la prostate et des testicules, mais aussi de santé mentale, car l’on déplore près de quatre fois plus de suicides chez les hommes que chez les femmes. « Il y a une nette prépondérance des suicides masculins », confirme le docteur Marc Fillatre, psychiatre et président de l’Union nationale pour la prévention du suicide, qui rappelle cependant que les tentatives de suicides sont plus nombreuses chez les femmes. Les hommes ont en effet recours à des méthodes souvent plus létales (pendaison et arme à feu notamment). « Ils sont moins dans l’échange et dans la discussion et plus dans la radicalité », poursuit Marc Fillatre. « Ils se confient moins sur leur projet et on les entend plus difficilement, donc on peut moins bloquer les passages à l’acte. »
« C’est plus difficile pour les hommes de partager leurs difficultés »
Pour le praticien, il existe encore un réel tabou sur la santé mentale des hommes. « Il y a toujours cette idée que les hommes ne peuvent pas manifester un certain nombre de choses qui seraient réservées aux femmes », explique-t-il. « C’est plus difficile pour les hommes de partager leurs difficultés que pour les femmes, c’est moins culturel. » Selon le docteur Marc Fillatre, « la société n’encourage pas les hommes, dans les façons d’éduquer les garçons depuis tout petit, et il y a une sorte d’interdiction qui est faite par soi-même pour les hommes de s’exprimer là-dessus. Même si on déconstruit depuis quelques années ce modèle, il reste très intériorisé par les hommes et par beaucoup de femmes. »
Bonne nouvelle, ces stéréotypes de genre évoluent, constate Marc Fillatre, qui s’occupe notamment des adolescents. « Les garçons parlent plus facilement. Dans mon service, quand j’ai commencé il y a plus de 35 ans, il y avait essentiellement des filles hospitalisées. Aujourd’hui, les garçons sont plus présents dans les services de psychiatrie. » Selon le médecin, « chez les plus jeunes, cette réticence à parler de soi disparaît. » Les changements de mentalité sont toutefois longs. « Il faut faire comprendre que ce n’est pas un défaut de masculinité que de faire part de ses souffrances », confie le praticien. « Il faut déjà que les choses changent dans l’Éducation nationale, que dès les petites classes les garçons ne soient pas élevés en disant qu’un garçon c’est fort et ça ne pleure pas. »
Si vous êtes en détresse ou que vous voulez aider une personne en souffrance, vous pouvez contacter le 3114.